L’essentiel d’IFRS 16 Contrats de location
Principe de base : toutes les locations seront traitées comme l’étaient auparavant les locations-financements
IFRS 16 abandonne pour les preneurs la classification traditionnelle des contrats de location en contrats de location simple ou contrats de location-financement, traitant tous les contrats comme des contrats de location-financement.
Cette modification se traduira par l’inscription de tous les contrats de location au bilan des preneurs et une augmentation corrélative de l’endettement. Elle améliorera la comparabilité entre secteurs et intra sectorielle, car la distinction entre location simple et location-financement était souvent opportuniste (traitement comptable), ne permettant pas de refléter correctement les actifs réellement utilisés par l’entreprise ni son endettement réel. Ainsi, inévitablement, les investisseurs et les analystes étaient conduits à rétablir grossièrement et extra comptablement le niveau d’endettement réel en appliquant par exemple un multiple aux charges de location simple.
Champ d’application
La norme s’applique à tous les contrats de location répondant à la définition d’un contrat de location : « un contrat de location est un contrat, ou une partie d’un contrat, qui confère le droit d’utiliser un actif pour une période donnée moyennant une contrepartie ».
Deux exceptions sont cependant prévues : les contrats de courte durée (moins d’un an sans aucune option ni possibilité de renouvellement) et les contrats portant sur des actifs de faible valeur ne seront pas inscrits au bilan.
La nouvelle norme remplace :
- la norme IAS 17 « Contrats de location »,
- les interprétations IFRIC 4 « Déterminer si un accord contient un contrat de location », SIC 15 « Avantages dans les contrats de location simple » et SIC 27 « Evaluation de la substance des transactions prenant la forme juridique d’un contrat de location.
Sont exclus d’IFRS 16 certains contrats qui relèvent de normes spécifiques :
- les contrats de location portant sur l’exploitation de ressources minérales (IFRS 6),
- les contrats de location portant sur des actifs biologiques (IAS 41),
- les accords de concessions de services (IFRIC 12 - Accords de concession de services) ,
- les accords de licence de propriété intellectuelle octroyés par le bailleur (IFRS 15), et
- les droits détenus par le preneur en raison d’accords de licence portant sur des éléments tels que des films cinématographiques, des enregistrements vidéo, des pièces de théâtre, des manuscrits, des brevets et des droits de reproduction (IAS 38).
Quels changements ?
Le modèle unique pour les preneurs consistera à comptabiliser à l’actif un « actif de location », c’est-à-dire le droit d’utiliser un actif pour une période de temps limitée. Cet actif pourra être présenté sur une ligne séparée ou sur la même ligne que les biens en propriété de même nature que ceux pris en location. Au passif sera comptabilisée la dette de location.
Au compte de résultat, figureront l’amortissement de l’actif de location et les intérêts relatifs à la dette de location.
Le montant payé pour rembourser le principal de la dette figurera dans la partie financement de l’état des flux de trésorerie, tandis que le montant relatif aux intérêts pourra figurer en exploitation (operating) ou en financement.
Importance pour les investisseurs
Certains secteurs seront plus affectés que d’autres, en particulier ceux qui usent sans modération de la comptabilisation « hors bilan » que permettent les locations dites simples : compagnies aériennes, grande distribution, voyages et loisirs. En outre, à l’intérieur de chacun de ces secteurs, certaines sociétés seront plus affectées que d’autres.
Le modèle est facile à comprendre, puisqu’il s’agit d’une simple généralisation du modèle qui existait depuis 33 ans pour les locations–financements. Les notes annexes seront également améliorées.
Quid des bailleurs ?
Pour eux, très peu de changement, le modèle existant fonctionnant assez bien pour qu’il ne fût pas utile de le changer. Cependant, les bailleurs devront améliorer l’information sur le risque de la valeur résiduelle.
Convergence avec les normes américaines (US GAAP)
L’IASB et le FASB ont travaillé ensemble à l’amélioration de leurs normes respectives et sont parvenus à s’accorder sur des points majeurs. Cependant, les conclusions diffèrent sur la comptabilisation des charges et des flux de trésorerie.
Bilan | IFRS 16 | US GAAP | ||
Anciennes locations financements | Anciennes locations simples | |||
Comptabilisation | Activation de tous les contrats | OUI | OUI | OUI |
Exemption pour les contrats de courte durée | OUI | OUI | OUI | |
Exemption pour les actifs de faible valeur | OUI | NON | NON | |
Evaluation | Dette actualisée | OUI | OUI | OUI |
Actif initial = Passif | OUI | OUI | OUI | |
Amortissement de l’actif | Linéaire | Linéaire | Progressif | |
Présentation | Actif |
Immobilisation ou ligne séparée |
Présentation séparée |
Présentation séparée |
Dette | Selon IAS 1 | |||
Compte de résultat | ||||
Coûts opérationnels | Amortissement | Amortissement | Charge unique | |
Charges financières | Intérêt | Intérêt | Non applicable | |
Tableau de flux de trésorerie | ||||
Activités opérationnelles | Intérêt | Intérêt |
Intérêt et principal |
|
Activités financement | Principal | Principal | Non applicable |
Evaluation de la dette
Elle doit être mesurée à la valeur actuelle des paiements futurs. Ceux-ci ne comprennent que les paiements économiquement inévitables et une approche simplifiée est appliquée aux paiements variables.
Evaluation des actifs
Ils sont mesurés initialement au même montant que la dette, y compris les coûts directement liés à l’obtention du contrat. Ils sont ensuite amortis comme les immobilisations, souvent linéairement. Dans les premières années, l’actif diminuera plus vite que la dette, mais l’effet sera peu sensible pour les entités qui recourent régulièrement à la location.
Effet sur les mesures non-gaap
IFRS 16 accroitra l’EBITDA car l’amortissement et l’intérêt se trouveront « au-dessous » de l’EBITDA, alors que la charge de loyer simple se trouvait « au-dessus ». Des ratios vont donc en être affectés. Cela devrait cependant être sans conséquence, car les analystes tentent déjà de retraiter l’EBITDA calculé selon la norme IAS 17.
L’information dans les notes
L’information sur la maturité et l’échéance des dettes de location est renvoyée à IFRS 7.
IFRS 16 est moins prescriptive que ne l’était IAS 17 : elle indique les objectifs poursuivis et laisse aux préparateurs le choix des informations les plus utiles pour les investisseurs. C’est la nouvelle approche désormais poursuivie par le Board.
Dispositions transitoires
Pour simplifier la transition, la norme permet à une entité de conserver la définition antérieure d’un contrat de location à tous les contrats en cours à la date d’entrée en vigueur de la norme.
Pour les preneurs, en ce qui concerne les contrats de location considérés précédemment comme des contrats de location simple, ils auront la possibilité d’opter soit pour une approche rétrospective complète soit pour une approche rétrospective « modulée » (« modified ») ne nécessitant pas une information comparative mais seulement l’ajustement des capitaux propres d’ouverture.
Les bailleurs continueront à appliquer la comptabilité actuelle pour tous les contrats en cours à la date d’application de la nouvelle norme, à l’exception des bailleurs intermédiaires dans le cadre d’un contrat de sous-location.
Pour conclure
Ce travail de longue haleine a duré six ans et le délai entre le début du projet et l’application aura été de dix ans : un document de discussion, deux exposés-sondages, des centaines de réunions avec les analystes et préparateurs, 1700 lettres de commentaires… pour un résultat à la fois assez simple et très important.