Impact de la crise liée à la Covid-19 sur les comptes : FAQ de la CNCC
1. Quels surcoûts liés à la crise sanitaire est-il possible d’intégrer dans le coût de production des stocks (question 4.1.1) ?
Pour rappel, les coûts liés à la sous-activité ne peuvent être pris en compte dans le coût de production des stocks, ce dernier comprenant tous les coûts directement liés aux unités produites à l’exclusion des montants anormaux de déchets de fabrication, de main d’œuvre ou d’autres coûts de production (art. 213-18 et 213-32 du PCG).
La CNCC estime que les coûts supplémentaires (masques, gels hydroalcooliques, mesures barrière) qui ont été engagés du fait des mesures sanitaires font normalement partie des coûts de production. Toutefois, elle précise les points suivants : si le volume d’activité est inférieur à la capacité normale de production du fait d’une réduction volontaire de la production consécutive à une baisse des ventes, l’incorporation des frais fixes aux coûts de production doit être calculée sur la base de la capacité normale de production et l’écart par rapport au montant total des frais fixes doit être maintenu en charges.
Lorsque les contraintes sanitaires n’ont pas permis d’utiliser totalement la capacité normale de production, il est possible que les mesures prises par l’entreprise soient temporaires et n’aient pas pour autant remis en cause le niveau d’activité considéré jusqu’alors comme représentatif de l’activité normale. Dans ce cas, il est donc approprié d’effectuer un retraitement d’imputation des charges fixes lié à la sous-activité ainsi constatée.
En revanche, dans la situation où les mesures mises en œuvre durant la crise sanitaire seraient amenées à être maintenues, conduisant ainsi à la détermination d’une nouvelle capacité normale de production, la sous-activité devrait dès lors être calculée uniquement à hauteur de la différence entre la production réellement constatée et la nouvelle capacité normale de production.
En tout état de cause une information circonstanciée dans l’annexe doit être donnée quant à l’impact de la crise sur les volumes de production et le traitement comptable retenu.
Notons qu’il n’existe pas de divergence de traitement au regard du référentiel IFRS.
2. Pour l’évaluation du coût de production des stocks, comment traiter les aides sociales (allocation d’activité partielle, exonération de charges sociales…) (question 4.1.2) ?
Dès lors que les aides sociales perçues conduisent à une réduction du coût de la main d’œuvre directe incorporée au coût de production des stocks, ces aides doivent être prises en compte en atténuation du coût de production des stocks.
Toutefois, il est probable que la perception de telles aides soit révélatrice d’une sous-activité. Dans cette hypothèse, le montant des salaires à retenir pour le calcul du coût de production sera alors calculé, comme pour l’ensemble des frais fixes, sur la base du ratio de la production réalisée sur la capacité normale de production, et par différence, le montant des salaires non productifs sera maintenu en charge de l’exercice. Aussi, dans ce cas, les aides reçues au titre de ces salaires seront comptabilisées en produit et ne viendront pas réduire le coût de production des stocks.
Notons qu’il n’existe pas de divergence de traitement au regard du référentiel IFRS.
3. Quid des modalités d’amortissement des immobilisations au regard des périodes de réduction ou d’arrêt d’activité (questions 4.2.1, 4.3 et 4.4) ?
Les précisions données par la CNCC doivent être lues à la lumière des recommandations de l’ANC mises à jour en juin dernier portant sur la prise en compte des conséquences liées à la Covid-19 dans les comptes et situations intermédiaires établis à compter du 1er janvier 2020 (point D.1). A ce titre, rappelons que l’ANC a admis qu’un plan d’amortissement puisse être modifié par référence à des unités d’œuvre pertinentes (qu’il conviendra de déterminer), dès lors qu’il est démontré que :
- le rythme de consommation des avantages économiques n’est pas fonction du temps, mais du degré d’utilisation plus ou moins fort de l’immobilisation ;
- si un amortissement linéaire était pratiqué jusqu’ici, c’est parce que le degré d’utilisation de l’immobilisation était lui-même linéaire et stable dans le temps et que le mode linéaire était donc une approximation satisfaisante des unités d’œuvre.
En ce qui concerne les immobilisations concernées par cette situation, la CNCC a indiqué les points suivants :
- Sont concernées, les immobilisations d’exploitation c’est-à-dire celles pour lesquelles la consommation des avantages économiques est fonction de leur utilisation effective. Cette situation ne concerne donc pas les immobilisations corporelles qui subissent une usure par le seul passage du temps (quel que soit le niveau d’activité).
- Les immobilisations incorporelles pourraient être également incluses dans des situations très spécifiques où il est démontré que leur utilisation est liée au niveau d’activité.
- Les installations techniques, matériels et outillages peuvent être aussi concernés.
- Les véhicules utilitaires peuvent, de même, être concernés, leur usure étant plus ou moins importante en fonction des kilomètres parcourus.
- En revanche, la structure et les principaux composants d’un bâtiment s’usent quoi qu’il arrive avec le temps, que le bâtiment soit occupé ou non.
- Les agencements de bureaux ou d’espaces événementiels, s’ils s’usent avec le temps, peuvent cependant s’user moins vite en l’absence de fréquentation. Pour ces derniers, un allongement de la durée d’utilité peut se justifier plutôt qu’un arrêt temporaire de l’amortissement.
Au regard du référentiel IFRS, la CNCC a estimé que seule une modification importante de l’utilisation prévue de l’actif résultant de la crise sanitaire et économique liée à l’épidémie de Covid-19 serait de nature à entraîner une révision prospective du mode d’amortissement (au titre d’un changement d’estimation).
Autre sujet abordé : il s’agit de la mesure de tolérance accordée aux petites entreprises (au sens comptable) qui leur permet de retenir les durées d’usage fiscales pour l’amortissement de leurs immobilisations. A la question de savoir si elles peuvent retenir un amortissement en unité d’œuvre pour certains actifs et les durées d’usage fiscales pour d’autres (question 4.4), la CNCC apporte une réponse positive : « en l’absence de précision contraire, ce choix est à appliquer de façon homogène à l’ensemble des immobilisations de l’entité présentant la même nature et des conditions identiques d’utilisation, tant que l’entité ne dépasse pas les seuils ».
Par ailleurs, l’ANC a octroyé à ces petites entreprises le droit de considérer que les périodes d’interruption ou de réduction d’activité sont représentatives d’une moindre consommation des avantages économiques de l’immobilisation concernée et de reporter ainsi à la fin du plan d’amortissement initial les dotations aux amortissements ainsi différées. La CNCC apporte des éléments utiles à la bonne information des lecteurs des comptes lorsque l’entité a pris cette option (question 4.3). L’annexe doit indiquer dans ce cas :
- l’option prise pour le report ;
- le montant des amortissements reportés ;
- les périodes au titre desquelles un montant a été reporté ;
- l’exercice au cours duquel il est prévisible que la charge d’amortissement reportée sera constatée en résultat ;
- le montant des amortissements dérogatoires éventuellement constatés.
En ce qui concerne le référentiel IFRS, il n’existe pas de sujet sur ce point dans la mesure où il n’est pas prévu d’exception aux principes généraux selon la taille des entités.
4. Quel traitement comptable lorsque l’entreprise a opté pour la réévaluation libre des actifs corporels et financiers telle que prévue par l’article 31 de la loi de finances pour 2021 (questions 4.5.1, 4.5.2, 4.5.3 et 4.5.4) ?
En préambule, notons que cette décision n’a pas de conséquence en référentiel IFRS, les méthodes prévues par les normes IAS 16 « Immobilisations corporelles » (méthode de la réévaluation possible pour l’évaluation postérieure à la date de comptabilisation) et IAS 40 « Immeubles de placement » (méthode de la juste valeur possible pour l’évaluation postérieure à la date de comptabilisation) continuant à s’appliquer.
Quant au référentiel comptable français, il convient de tenir compte du régime de neutralité fiscale instauré par la loi de finances précitée, à savoir un étalement de l’imposition de l’écart de réévaluation sur 15 ans pour les immeubles et sur 5 ans pour les autres immobilisations corporelles. Pour les immobilisations non amortissables, il est prévu un sursis d’imposition jusqu’à leur date de cession. L’instruction fiscale qui a commenté ce dispositif (BOI-BIC-PVMV-40-10-60-30 du 9 juin 2021) a précisé que la réintégration dans le résultat se ferait extra-comptablement et qu’il n’y a pas lieu de reprendre automatiquement les amortissements dérogatoires constatés antérieurement. Par conséquent, la doctrine (CNCC, EC 85-04) selon laquelle les amortissements dérogatoires doivent être repris à la date de réévaluation devient caduque.
Par ailleurs, il est précisé que dans les comptes sociaux l’écart de réévaluation comptabilisé en capitaux propres ne doit pas tenir compte de l’impôt futur à payer dès lors que l’entité ne comptabilise pas d’impôt différé dans ses comptes sociaux.
Pour l’établissement des comptes consolidés établis en normes françaises, il est rappelé que la consolidante a la possibilité soit d’éliminer la réévaluation comptabilisée dans les comptes sociaux, soit de réévaluer l’ensemble des immobilisations corporelles et financières du groupe dans les mêmes conditions que celles prévues pour les comptes individuels. Quant à l’impact sur les impôts différés, après avoir rappelé qu’il convient de comparer la valeur comptable consolidée des actifs à leur valeur fiscale (égale à la valeur réévaluée minorée de l’écart d’acquisition) à la date de réévaluation et à chaque clôture ultérieure pour déterminer l’impôt différé correspondant, la CNCC prend la position suivante :
- Si la réévaluation est retraitée dans les comptes consolidés, il n’y a pas de nouvel impôt différé à constater à la date de l’opération. En revanche, les bases comptables et fiscales peuvent évoluer différemment dans le futur et générer des impôts différés. Ainsi, au fur et à mesure de l’amortissement des actifs, dès lors que, dans les comptes sociaux, l’écart de réévaluation n’est pas imposé au même rythme que l’amortissement correspondant est déduit, un impôt différé est constaté sur la différence entre l’amortissement comptable et l’amortissement fiscal effectif (amortissement déduit minoré de la quote-part d’écart de réévaluation imposée).
- Si la réévaluation est maintenue dans les comptes consolidés, elle donne lieu à la constatation d’un impôt différé passif calculé sur la différence entre la nouvelle valeur consolidée des actifs et leur valeur fiscale (inchangée). Ce passif est résorbé au fur et à mesure de l’imposition de l’écart de réévaluation.
Enfin, il est précisé que l’écart de réévaluation correspondant à la différence entre la valeur réévaluée des actifs et leur VNC consolidée antérieure est comptabilisé en capitaux propres net de l’impôt différé passif.
5. Faut-il comptabiliser une provision pour risques et charges en cas de perception d’indemnités indues ou pour un montant supérieur à ce que l’entreprise avait droit (question 7.2) ?
Une analyse des circonstances est nécessaire pour répondre à cette question. Ainsi, la CNCC envisage deux cas de figure :
- Dans le premier cas où l’entreprise sait pertinemment que les sommes reçues sont supérieures au montant auquel elle a droit (par exemple, erreur de calcul de l’URSSAF conduisant à un trop versé, versement d’une aide non sollicitée, …), les montants indument perçus ne doivent pas être comptabilisés en produit mais doivent être constatés au passif du bilan en tant que dettes. Cette dette ne pourra être reprise en produit qu’à l’issue de son délai de prescription si le créancier ne le réclame pas avant.
- Dans le second cas où les sommes perçues correspondent au montant auquel l’entité estime avoir droit mais que l’administration serait toutefois susceptible de remettre en cause a posteriori au regard de son appréciation du respect des conditions d’attribution : dans cette situation et sans attendre le contrôle, l’entité doit estimer la probabilité de remise en cause des sommes perçues en fonction des informations dont elle a connaissance, en particulier : l’existence de faits susceptibles de remettre en cause l’éligibilité de l’entité aux aides, l’existence de contrôles du même type dans le groupe ou au sein d’entreprises du même secteur ou rencontrant les mêmes problématiques. Au regard de ces éléments, les sommes perçues dont il apparaît probable qu’elles devront faire l’objet d’une restitution doivent faire l’objet d’une provision.
6. Quels impacts comptables pour une renégociation de loyers de principe à la date de clôture mais dont l’avenant définitif est signé après cette date mais avant la date d’arrêté des comptes (question 9.4) ?
Par principe, un avantage consenti au preneur dans le cadre d’une renégociation de contrat de location ne peut être comptabilisé à la date de clôture que s’il est définitivement acquis à cette date (PCG, art. 513-3). Le preneur doit dès lors disposer d’un accord irrévocable du bailleur, qui ne puisse pas être remis en cause ultérieurement. Par analogie avec le principe de comptabilisation d’une vente avec condition suspensive, le produit ne peut être comptabilisé qu’à la date à laquelle l’accord est définitif et, le cas échéant, la condition suspensive levée (PCG, art. 512-1, IR), ce qui s’apprécie à la date de clôture et non à la date d’arrêté des comptes.
Toutefois, il convient de prendre en compte les éléments et faits qui pourraient conduire à ce que la validation définitive n’ait qu’un caractère purement formel. Ce caractère purement formel de la validation définitive s’apprécie au cas par cas au vu des faits et circonstances, par exemple s’il est démontré, que l’interlocuteur qui a donné son accord de principe à la clôture disposait bien, dans les faits, du pouvoir de validation définitive en vertu d’un niveau de délégation adéquat.
En IFRS, les effets de la renégociation conclue postérieurement à la date de clôture ne devant pas être anticipés (IAS 10, §3, 10 et 11), le même raisonnement peut être retenu.
CNCC – FAQ n°8 du 11 juin 2021
ANC – Recommandation du 9 juillet 2021
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