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Rapport Morand/Marteau sur les normes comptables et la crise financière
Pascal MORAND et Didier MARTEAU, respectivement directeur général et professeur à l'ESCP Europe, ont remis à Mme Christine LAGARDE, Ministre de l'Economie, de l'Industrie et de l'Emploi, le 26 octobre 2009, un rapport intitulé "Normes comptables et crise financière", sous-titré "Propositions pour une réforme du système de régulation comptable".
Ce rapport s'intéresse notamment aux évolutions actuellement débattues au sein de l'International Accounting Standards Board (IASB) s'agissant de la valorisation des instruments financiers. Il présente également les questions de gouvernance de la normalisation comptable.
Les principales conclusions des deux auteurs présentées dans ce rapport sont les suivantes :
Juste valeur
Diagnostic
Sur la base de l'exposé-sondage (ED/2009/7) publié par l'IASB le 14 juillet 2009 intitulé "Instruments financiers : classification et évaluation" , "le périmètre de la valorisation en "fair value " par résultat augmente, mais le périmètre des positions soumises à la règle générale de la "fair value ", indépendamment de l'imputation de ses variations, peut s’accroître ou régresser selon les choix des établissements et la structure des portefeuilles".
"L’extension de la "fair value " implique l’accroissement des valorisations comptables au prix de modèle, plus complexes à estimer et entourées d’une marge d’incertitude très élevée".
"Nous acceptons l’idée évidente que le prix de marché est une information utile, mais nous considérons parallèlement qu’elle ne doit pas, systématiquement, et donc indépendamment du modèle d’activité, affecter le résultat. Les variations de "fair value " devraient être imputées, selon le modèle d’activité, soit au compte de résultat, soit dans les capitaux propres, voire sur certains portefeuilles être simplement mentionnées en annexe."
"L’extension de l’application de la "fair value " implique un renforcement des structures internes et externes de contrôle des estimations comptables produites par les entités".
Propositions
"Exiger des instances de normalisation comptable de rendre explicites les principes fondateurs des normes produites. Celles-ci semblent aujourd’hui reposer sur trois principes au moins discutables, jamais validés par une instance démocratique, l’adossement des informations comptables aux besoins des investisseurs de court terme, la mesure du résultat par la variation des postes du bilan et enfin la valorisation des actifs et passifs au prix de marché".
"Limiter le champ d’application de la "fair value " aux positions financières assimilées à des "valeurs d’échange", c’est-à-dire à un périmètre proche du portefeuille de transactions".
"Valoriser les autres positions financières à leur valeur d’usage, qui peut être le coût amorti ou toute autre méthode d’évaluation ne prenant pas en compte le spread de liquidité".
"Le système de valorisation proposé n'est pas un retour au coût historique. Le prix de marché est retenu en priorité pour les valeurs d'échange, remplacé par un prix de modèle si la liquidité est insuffisante. Les actifs de crédit portés à échéance sont valorisés au coût amorti, avec un système de provisionnement reposant sur les pertes attendues, qui prend en compte, au nom du principe de prudence, la dégradation éventuelle de la qualité de crédit au cours du temps".
"Dans un souci de transparence, supprimer le terme "fair value " du référentiel de valorisation comptable. Un actif financier peut avoir deux valeurs "fair ", le prix de marché s'il est destiné à l'échange, une valeur d'usage (coût amorti associé à un provisionnement des pertes attendues par exemple) s'il est porté jusqu'à l'échéance".
Sur les positions valorisées au prix de marché, prévoir un changement exceptionnel de mode de valorisation lorsque les circonstances de marché l’exigent, afin d’extraire le spread de défiance des valorisations. Traiter de manière symétrique les crises financières et les "bulles" de crédit. La responsabilité de ce changement de méthode doit être assurée par un régulateur international.
Redéfinir la responsabilité des auditeurs dans le processus de validation des valorisations, dans le sens d’une plus grande clarté. Le développement du marché de gré à gré des produits structurés, depuis le début des années 2000, met en lumière la question du périmètre de responsabilité des CAC, auxquels on ne peut demander, sauf à envisager un renforcement considérable de leurs moyens, la validation de chaque valorisation, voire du portefeuille global.
La question du périmètre de responsabilité des commissaires aux comptes sur le niveau des valorisations ne doit pas cacher celle de la responsabilité des entités émettrices de produits structurés, voire celle des investisseurs.
Créer une Haute Autorité de Valorisation, entité publique intervenant en appui éventuel des cabinets d’audit et lors des litiges de valorisation, de plus en plus nombreux.
Gouvernance des instances de normalisation comptable
Diagnostic
"Le système de normalisation comptable n’est pas neutre sur l’économie réelle et doit entrer, au moins partiellement, dans le champ de la responsabilité publique".
"Si les normes sont publiées à l’issue d’un due process d’un formalisme et professionnalisme d’apparence remarquable, incluant phases de consultation et de justification des décisions prises, les utilisateurs reprochent cependant de manière quasi-unanime à l’IASB son absence d’écoute et de responsabilité (accountability )".
"La qualité technique des commentaires formulés par l’European Financial Reporting Advisory Group (EFRAG) lors de l’examen des normes est reconnue, mais son double rôle d’instance souvent critique des normes proposées par l’IASB et de conseil souvent clément auprès de l’Union européenne lors de leur validation, soulève beaucoup d’interrogations et impose une redéfinition de ses responsabilités".
Propositions
"Faire entrer la mission de normalisation comptable, au moins partiellement, dans le champ de la responsabilité publique. Intégrer explicitement l’intérêt public parmi les paramètres d’entrée du processus de création de normes".
"Maintenir l’organisation actuelle du système de normalisation, mais avec, d’une part, une présence renforcée et active de l’Union européenne au sein du Board de l’IASB et, d’autre part, la prise en compte explicite de l’intérêt des Etats, des utilisateurs et des stakeholders et lors du processus de création ou d’amendement des normes".
"Renforcer l’indépendance des structures européennes d’examen des normes proposées par l’IASB. Veiller à ce que la représentativité des différents intérêts soit assurée de manière équilibrée, notamment au sein de l'EFRAG".
Pour consulter le rapport MORAND/MARTEAU (1,9 Mo).
Pour se connecter au site Internet de l'ESCP Europe.